L’éducation n’est pas réservée au domaine canin, chacun le sait. On parle aussi d’éducation auprès des enfants ou des adolescents. Or, tous les éducateurs vous le diront, quels que soient les publics visés, éduquer revient toujours à se questionner. Rien n’est jamais acquis, chaque individu étant unique, et chaque instant de la vie étant, lui aussi, singulier.
Le terme éducation vient du latin : ex-ducere, qui signifie guider, conduire hors de.
En somme, éduquer un individu revient à lui inculquer de nouvelles connaissances afin de le faire s’ouvrir au monde. Cela lui permet de quitter son « petit moi » pour s’éveiller et interagir avec son environnement. C’est pour cette raison que l’éducation est si importante pour s’épanouir socialement : elle guide le petit « je » vers le grand « nous ».
Mais qu’en est-il de l’éducation canine ? Comment pouvons-nous nous faire comprendre de notre animal ?
Le « je » : regard subjectif sur le monde
Le biologiste allemand Jakob von Uexküll a introduit la notion de Umwelt. Ce terme désigne l’environnement sensoriel, subjectif, propre à l’individu. Il part du principe que chaque être vivant perçoit le monde avec une sensibilité qui lui est propre. Par conséquent il va interagir avec son environnement d’une façon singulière.
Pour résumer, chaque être vivant vit dans son propre monde. C’est comme si nous portions tous des lunettes de couleurs différentes. L’environnement est filtré, appréhendé en fonction de la sensibilité de chaque individu.
Prenons un exemple tout simple : vous vous promenez avec votre chien au bord d’un étang.
Cette vaste étendue d’eau vous évoque peut-être les Nymphéas de Claude Monet, si vous êtes sensible à la peinture. Ou bien peut-être que cela vous évoque un souvenir d’enfance, lorsque vous alliez pêcher avec vos amis.
Votre toutou, qui marche à vos côtés, est certainement moins lyrique. Il y voit un moyen de se rafraîchir sous ce soleil brûlant. Ou peut-être qu’il rêve de nager en poursuivant ces canards qui semblent le narguer là-bas, au fond de la mare.
Quant à la maman moustique qui cherche où déposer ses œufs, elle a un tout autre regard sur cet étang : il sera pour elle le berceau de ses enfants.
Oui ! Une même chose peut être perçue de bien des manières, suivant la nature de celui qui la regarde.
« La beauté est dans les yeux de celui qui regarde » a dit Oscar Wilde. C’est notre façon de regarder les choses qui leur donne de la valeur.
Mais alors qu’avons-nous réellement en commun ? Comment pouvons-nous éduquer sans imposer ? Nous faire comprendre sans obliger ?
Ce qui nous rassemble
Chaque être vivant, quel qu’il soit, cherche à satisfaire ses besoins. C’est là le point qui nous rassemble, c’est là que nous pouvons nous comprendre.
C’est en connaissance de cause que les jardiniers arrachent les « mauvaises herbes » dans leur potager. En effet, ils savent que ces plantes vont naturellement puiser les minéraux nécessaires à leur croissance, même si cela implique de nuire au magnifique plan de carotte qui se trouve être leur voisin. La nature est ainsi faite : nous sommes tous doté d’un instinct de survie et cherchons à satisfaire nos besoins, du plus primaire au plus sophistiqué.
Abraham Maslow, un psychologue, a mis en place la pyramide des besoins, mettant en avant cinq groupes de besoins fondamentaux allant de l’essentiel (tel que le besoin de sommeil ou de nourriture) au plus sophistiqué (comme le développement personnel).
Cette pyramide a été revisitée par le vétérinaire Joël Dehasse dans son livre « mon chien est heureux », afin de l’appliquer à nos compagnons à quatre pattes. Voici le résultat :
En gardant ce schéma à l’esprit, nous pouvons enfin parler un langage commun : chaque espèce possède une pyramide de besoins qu’elle cherche à satisfaire au quotidien. Pour éduquer un animal, il suffit de connaître sa pyramide pour pouvoir entrer en contact avec lui.
C’est à cet instant que notre regard peut changer : non, votre chien ne vous désobéit pas délibérément dans le seul but de vous rendre fou. Il est simplement en train de chercher à satisfaire un de ses besoins : il aboie peut-être pour tromper l’ennui, il creuse un trou dans votre jardin pour satisfaire son besoin de chasse, il mordille vos chaussures pour soulager ses dents…
Mais comment se servir de cette pyramide pour éduquer notre animal ? En quoi peut-elle être une alliée ?
Le système de récompense : un pas vers le « nous »
En gardant à l’esprit que votre chien recherche la satisfaction de ses besoins, vous devrez lui faire comprendre que c’est en vous écoutant, et non en n’en faisant qu’à sa tête, qu’il obtiendra ce qu’il désire.
Si son comportement vous incommode il vous faut simplement trouver ce qui captera son attention et lui montrera qu’il gagnera davantage en vous écoutant.
Une croquette satisfera sa gourmandise, une balle son besoin de jeu, des encouragements son besoin de reconnaissance… Les récompenses que nous offrons à nos compagnons à quatre pattes se trouvent le plus souvent au sommet de la pyramide. Elles capteront l’attention de votre chien qui a l’habitude de se servir au plus près de la base de la pyramide, dans des besoins qui sont donc davantage essentiels.
Il comprendra alors que vous obéir est bénéfique pour lui, qu’il a tout intérêt à le faire. Cela inscrira en lui la notion de plaisir et on sait aujourd’hui que nous apprenons bien plus facilement en nous amusant donc en prenant du plaisir. Le travail forcé ne plaît à personne et ne donnera aucun résultat s’il n’est pas récompensé d’une façon ou d’une autre. Il en est de même pour nos compagnons à quatre pattes.
A la recherche de l’harmonie…
Nombre de propriétaires de chiens s’étonnent de voir leur animal refuser de revenir quand ils les appellent lors d’une promenade. Mais quelle en est la raison? C’est parce que ces maîtres, une fois que leur chien se trouve bien sagement assis à leur pied, leur passent la laisse au cou, comme seule récompense. Du point de vue de l’animal, le raisonnement est simple : « Quand je réponds à l’appel de mon maître, je me fais attacher ». Dans cette logique, il refusera de revenir au pied de son maître à l’avenir, préférant gambader librement plutôt que de se retrouver au bout d’une laisse.
Si en revanche, lorsque votre chien revient à votre appel, vous le félicitez joyeusement et lui offrez même une petite friandise, celui-ci reviendra avec plaisir à votre prochain appel.
Si votre chien refuse d’obéir, remettez-vous toujours en question : comment pourriez-vous donner envie à votre animal de répondre à votre ordre? Comment lui faire comprendre qu’il a tout à y gagner ?
Prenons l’exemple d’un chien qui aboie toujours quand vous prenez la laisse pour le sortir. Comme les aboiements de votre chien vous perturbent, vous courez vers la porte d’entrée pour sortir votre chien le plus vite possible afin que ces aboiements cessent.
Sans vous en rendre compte, vous avez récompensé le comportement de votre chien. En effet, du point de vue de votre animal, lorsqu’il aboie, la porte s’ouvre plus vite, il est donc plus rapidement dehors. Voilà sa récompense.
Donc, votre chien continuera d’aboyer de plus belle et vous ne comprendrez pas pourquoi, malgré vos interdictions, vos « non » mécontents, celui-ci persiste de plus belle. En réalité, vous lui envoyez deux messages contradictoires. A cela, le chien répond par un comportement déplaisant.
Les quiproquos de ce genre sont très fréquents et même inévitables en éducation. C’est simplement le signe que deux mondes différents, qui ont du mal à se comprendre, se confrontent. En temps qu’humain, notre rôle consiste à ouvrir nos perceptions pour entrer en réel contact avec l’animal. C’est dans cet espace privilégié qu’une véritable relation peut s’instaurer et que l’éducation prend tout son sens.
En fin de compte, il n’y a pas de bonne ou de mauvaise éducation. Il n’y a que des univers qui s’entrechoquent ou, au contraire, qui finissent par s’harmoniser. C’est cette harmonie que nous recherchons tous et qui est là, à portée de main. Il nous faut simplement faire preuve de patience et d’humilité en gardant à l’esprit que toute créature vivante recherche le plaisir, la satisfaction… le bonheur en somme.
Hyper intéressant ! Il est toujours important de « se mettre à la place » de son chien pour mieux le comprendre.
Même si je suis un peu moins d’accord avec la logique de pyramide… je pense que chaque besoin a son importance.
Chaque propriétaire de chien devrait se poser ces questions pour éduquer son chien. C’est aussi important pour les enfants de leur faire comprendre comment son chien fonctionne pour savoir où poser les limites et leur faire comprendre qu’il s’agit bien d’un être vivant, qui a aussi ses envies et besoins !
Superbe cet article !
Merci beaucoup pour ces conseils et surtout pour les deux pyramides !
Je viens d’adopter à la spa un petit malinois et j’essaye de le dresser au mieux avant ses 6 mois..
je fais le tour de la toile à la recherche de conseils gratuits, je partage aussi un forum qui est pas mal au niveau éducation mais un peu moins fun que guide du chien : uniquement des conseils.
Bonne journée!
Anais
Bonjour Anais,
Merci pour l’adresse du forum, je ne le connaissais pas. J’y ferai un tour, c’est toujours intéressant. C’est vrai qu’internet permet de trouver plein de conseils gratuits pour éduquer chiens et chiots. Pas besoin d’investir dans les conseils d’un comportementaliste si le besoin ne s’en fais pas sentir, on peu facilement se débrouiller seul en appliquant quelques conseils simples trouvés sur la toile en faisant preuve de bon sens et surtout de beaucoup de patience et d’amour !
Bonne journée à vous aussi
Chloé